UNE MONTINOISE AU CHAMPIONNAT DU MONDE D’IRONMAN À HAWAÏ

  Interview de Mylène Chalvin au retour du championnat du monde d’Ironman à Hawaï.

Mylène Chalvin médaillée
Mylène CHALVIN

Peux tu te présenter en quelques mots et nous décrire ton parcours sportif, ce qui t’a amené à faire du triathlon longue distance?


J'ai 44 ans, maman de 2 enfants Maly 15 ans et Lana 10 ans, je travaille comme professeur d'EPS au lycée PEV de Champagnole.
Je suis originaire du Haut Doubs et après avoir travaillé 2 ans dans l'Aube je suis revenue en Franche Comté dans le Jura.


J'ai commencé à faire de la natation en compétition depuis l'âge de 5 ans mais je touchais à pas mal d'activités sportives : ski de fond, VTT, planche à voile, snowboard. J'adorais jouer dehors et me lancer toutes sortes de défis . A partir du lycée j'ai pratiqué surtout de l'escalade et de l'alpinisme. En Staps à Besancon j'ai passé un initiateur escalade et le BNSSA pour travailler pendant mes vacances d'été et l'hiver je travaillais dans une Ecole de ski alpin.


Avec l'arrivée des enfants j'ai du mettre de côté la montagne et je me suis mise à courir en trail puis en cherchant des créneaux pour nager sur Lons j'ai découvert le club de Triathlon en 2006. A l'époque le club avait une équipe féminine en D1 de duathlon donc j'ai été rapidement mise dans le bain. Progressivement je me suis orientée vers les plus grandes distances qui m'attiraient davantage et j'ai fais mon premier Ironman à Nice en 2009.

Peux tu nous décrire l’épreuve et faire un lien en terme de distance au départ de Montain? (Ex, j’ai nagé de Montain à Lons, fait du vélo de Montain à ...)


L'épreuve consiste à enchaîner natation vélo et course à pied sur des longues distances sans s'arrêter.
3800 m de natation: Chille - Montain
180 km de vélo: Montain - Belfort
42 km en courant: Montain - Champagnole


Comment t’es tu préparée pour cette épreuve et quelles ont été tes difficultés,  obstacles?

La préparation générale se fait sur plusieures années de pratique et des qualités d'endurance que j'ai toujours eues (ou de vitesse que je n'avais pas 😅) mais pour la prépa spécifique pas de secret il faut avaler des km! Je nage environ 3500m deux fois par semaine. Pour le vélo ça dépend de la période de l'année (l'hiver je compense avec le ski et j'essaie de faire un stage en février en Espagne pour refaire du foncier, puis à partir du printemps j'essaie de rouler 3 ou 4 fois par semaine. Deux mois avant la course je place une sortie de 5-6h par semaine. Pour la course à pied j'essaie d'entretenir ma vitesse avec un peu de fractionné toute l'année et à l'approche de la course, j'essaie de rentrer quelques enchaînements longs de 2h-2h30. La plus grosse difficulté c'est le temps ! La gestion du quotidien : travail, enfants, maison, et je suis responsable de la commission sportive du club, bénévolement , et j'assure quelques entraînements : ce qui laisse peu de place pour le repos🙃.
L'autre grosse difficulté sur ces courses c'est l'alimentation : quoi manger? Et quand? En fonction du climat aussi la gestion peut être très differente. À Hawaï, le taux d'humidité, la chaleur et le vent implique une grosse adaptation.

Comment s’est passée l’épreuve? Moments forts, moments faibles...

La compétition a eu lieu le 14 octobre 2023.
Je n'avais pas beaucoup d'ambition pour cette course car j'étais déjà extrêmement heureuse d'avoir pu me qualifier et je pensais finir dans les dernières au milieu de toutes les meilleures féminines mondiales. Aujourd'hui j'ai encore du mal à réaliser que j'ai fait une course exceptionnelle et au delà de mes espérances 😅 en 11h04.
Je finis 57 ieme sur 324 dans ma catégorie et 330 ieme sur 2039 femmes.
La natation s'est tres bien passée, nager au milieu de poissons du pacifique et aller faire le tour d'un voilier à 1900 m au large, juste magique même si ça jouait un peu des coudes.


Le vélo est une grande route au bitume noire, jamais plate, au milieu des roches volcaniques sans un arbre et avec un vent chaud qui semble toujours de face. 90 km dans un sens puis demi tour très monotone et usant pour le moral. Le retour a été difficile et usant, j'ai réussi à ne pas descendre en dessous de 30,5 km/h de moyenne mais j'aborde la course à pied mal en point.


Les 8 premiers km de course à pied un peu difficile le temps de prendre le rythme et de me refroidir avec de la glace tous les 3 km puis des très bonnes sensations. L'impression que mon corps ne m'appartenait plus et courait tout seul malgré le dénivelé 😀. J'ai doublé énormément de participantes sur cette partie. Je finis le marathon en 3h44 avec 300 m de Dénivelé positif.

    Mylène à l'arrivée
    Course Mylène Chalvin
    Mylène dans le Marathon

     

     

    Les moments difficiles:

    • L'organisation liée au vélo; transport , livraison retardée, remontage et réglage à l'autre bout du monde.
    • L'appréhension du mal de mer avant de rentrer dans l'eau.
    • Le vent la chaleur la déshydratation et les irritations à vélo.

     

    Les moments forts:

    • l'ambiance formidable la semaine avant course entre toutes les athlètes du monde.
    • L'euphorie en course à pied de me sentir si bien.
    • Passer la ligne d'arrivée réaliser seulement à ce moment que c'était sûrement un rêve et pleurer de bonheur.

    Qu’est ce que tu aimes dans cette épreuve, ce sport?


    C'est l'aventure, rien n'est jamais joué d'avance, beaucoup de paramètres rentrent en jeu. La gestion d'avant course et les principes d'entraînement me passionnent et il faut arriver sur la ligne de départ avec un max de chances de son côté puis, toute la course ,c'est un défi contre soi-même. On fait équipe avec son propre corps, on négocie avec son mental, on croise les doigts pour qu'il n'y ait pas d'ennuis mécaniques et on écrit une nouvelle histoire à chaque fois. C'est un peu la surprise☺ !


    Quelles sont les qualités et valeurs dont il faut faire preuve pour réussir dans ce sport?


    Des qualités d'endurance, de persévérance et de mental surtout 😅, mais aussi beaucoup d'humilité car rien n'est jamais joué d'avance.
    Pratiquer avec plaisir même dans l'effort sinon c'est trop difficile.

    Quand on a touché le graal du triathlète, comment on se relance sur un nouvel objectif?


    À la fin d'une prépa, avec la fatigue, on se dit souvent qu'après on va couper un peu et prendre du temps pour soi mais dès que l'objet est passé, et encore plus quand il se passe bien, on a déjà envie d'y retourner. Je n'ai jamais eu l'objectif de me qualifier à Hawai, j'ai toujours voulu faire mieux ou faire plus, et petit à petit j'en suis arrivée là. Il y a tellement d'épreuves aujourd'hui que je n'aurai pas assez d'une vie pour tout faire😃. Notre parcours est fait d'opportunités qu'il faut savoir saisir, l'envie fait le reste. Et j'ai encore plein d'envies😉


    Et par conséquence, quels sont tes projets pour l’année prochaine?


    Pour l'instant je n'ai pas trop eu le temps d'y penser mais normalement le marathon de Barcelone, sûrement un Half Ironman et quelques triathlons plus courts avec mes enfants et les copains de mon club. Le partage donne encore une autre dimension à ce genre de défi, alors peut être un raid par équipe aussi.