Cet édifice des 11ème et 12ème siècle fut autrefois l'église du petit village d’Auvillers, dédié à Saint-Christophe et à Saint-Jacques. D'où, pour le village, le nom d'Auvillers-Saint-Jacques. Elle est rattachée à Neuilly-sous-Clermont en 1825.
Nous voici dans la Nef. Le saviez-vous : La nef était souvent construite par les paysans. Vous remarquerez, d’ailleurs, que les pierres de la Nef sont de petite taille alors que celles du Chœur, généralement payées par le Seigneur, sont en pierre de taille. C'était la partie profane du monument. Là, se tenait le marché. On pouvait bénéficier du droit d'asile en vigueur au Moyen Age.
Les murs sont décorés de vingt-cinq arcades gracieuses qui évoquent la cour intérieure du cloître.
Elles sont surmontées de quatorze tableaux, en relief, peints, d'inspiration italienne : ce sont les quatorze « Stations » de la croix qui décrivent les épisodes de la Passion du Christ.
Au-dessus encore, sept baies étroites laissent entrer la lumière. L'étroitesse de ces baies exprime le souci des bâtisseurs de ne pas amoindrir la résistance des murs sous la poussée de la voûte. Une huitième, un peu plus basse et d’architecture différente semble avoir été créée pour éclairer la Madone.
Cette voûte est soutenue par des poutres transversales décorées de motifs peints dont les extrémités, tenues par la gueule d'un monstre, s'appuient sur le mur au-dessus des baies.
Ces monstres s’appellent des « engoulants » : engoulant provient de la racine « gueule » ou « goule » se référant à l’organe servant à parler, à crier, à manger. Le verbe « engueuler » en est un dérivé. Ce mot est conservé en architecture. Au moyen-âge engouler signifiait « avaler ». Caractéristiques de l’art médiéval, l’engoulant ou rageur est une tête de dragon qui orne souvent le coin des poutres maîtresses, comme ici. Mais pourquoi de telles représentations aux points stratégiques des Eglises ? Dans le monde chrétien, ils représentent les forces du mal, recevant en châtiments sur leur corps : le poids de la voûte céleste.
La voûte n'est pas véritablement romane mais d'un style pré-gothique. Les étoiles dont elle est constellée furent réalisées au pochoir, en peinture à la colle, fixées avec des produits naturels tels que des œufs, de la cire d'abeille, voire du sang.
Le sol, à l'origine, était de terre battue colorée d'ocres qui flattaient l'œil. On y répandait parfois des herbes ou des pétales de roses qui embaumaient.
Au fond de la Nef, les fonts baptismaux construits en pierre du pays sont aussi anciens que la Nef elle-même. Remarquons aussi le confessionnal qualifié d’étrange. On suppose que c’est du fait qu’il est en pierre et non en bois comme la plupart des confessionnaux.
A l'opposé, côté chœur, s'élèvent deux autels. Celui de gauche est surmonté d'un bas-relief en marbre qui est la copie de la fameuse MADONE D'AUVILLERS vendue en 1903 au Musée du Louvre. Dû à Agostino di Duccio, sculpteur italien du 15ème siècle, ce relief aurait été rapporté d’Italie, selon la légende locale, par le général de division Michaud (1752-1835), héros des guerres napoléoniennes et de la révolution (son nom figure sur l’Arc de triomphe à Paris), alors propriétaire du château. Sa petite fille, Fanny-Françoise-Aglaé, épousa Robert-Louis de Bonnières de Wierre et le couple s’attacha à restaurer la chapelle.
Lors de la vente au Louvre, il fut stipulé qu’une copie viendrait prendre la place de l‘original. Celle-ci fut exécutée par Jean Escoula, sculpteur qui faisait partie de l’entourage de Rodin, et non par Denys Puech comme on l’a cru longtemps. De même, des recherches récentes ont montré que ce bas-relief, probablement exécuté pour Pierre de Médicis à Florence au XVème siècle, avait été rapporté d’Italie, sans doute dès le XVIème siècle, par la famille des Falconis qui fit l’acquisition de la seigneurie d’Auvillers en 1672. Cécile de Falconis et son mari, Antoine comte d’Amanzé et de Chauffailles, vécurent au château dans les années 1700 et en 1712, « Dame Cécile de Falconnois, épouse de Monsieur Antoine Damanzé, compte de Chauffaille » fit don de la cloche qui se trouve toujours dans le clocher.
La sculpture, d’une finesse remarquable, fut classée au titre des monuments historiques par arrêté ministériel du 23 juillet 1892. Elle avait en effet été reconnue comme un chef-d’œuvre de la Renaissance et sa place semblait être tout naturellement au musée du Louvre. La commune autorisa la vente qui se fit en accord avec Robert de Bonnières, mais sans l’assentiment de l’évêché, qui interdit alors la chapelle d’Auvillers où l’exercice du culte fut suspendu pendant un an et demi.
Sur l'autel de droite, se tenait autrefois une statue en bois datant de la Renaissance, représentant Saint-Jacques en pèlerin évangélisateur.
Entre l'autel de la Madone d'Auvillers et celui de Saint-Jacques, commence le transept ou, à vrai dire, une croisée de transept, sorte de sas entre la nef et le chœur.
Le style en est composite : roman à partir du sol, gothique par ses deux arcs transversaux entre lesquels se croisent diagonalement deux colonnes engagées, de couleur terre de Sienne, reposant sur quatre corbeaux turquoise. Ces colonnes dites engagées sont elles aussi de style gothique.
En revanche, le clocher qui s'élève au-dessus est roman.
Le chœur est remarquable par ses dimensions : il est moins large que la nef et est excentré. Sur les murs, une série de bas-reliefs évoque des scènes bibliques : Naissance du christ, fuite en Egypte, mort de Joseph, dormition de la Vierge, assomption de la vierge Marie.
Trois vitraux éclairent le chœur. Deux d'entre eux sont gothiques. Celui du centre est de style roman, teinté dans la masse et serti de plomb. Il représente les deux saints du lieu : Saint-Christophe qui traverse des ondes torrentueuses en portant l'Enfant sur son épaule et Saint-Jacques cheminant avec son bâton de pèlerin et son baluchon.
La fresque a été peinte sur le matériau frais pour résister à l'agressivité de la chaux. Les monogrammes des deux saints et toutes les dorures y sont faits à la feuille d'or.
Les ogives se croisent en une clé de voûte excentrée sur la gauche et décorée de feuilles de lauriers.
Le plafond est peint aux attributs des quatre évangélistes : l'homme, le bœuf, le lion et l'aigle qui symbolisent aussi la vie de Jésus Christ.
Saint-Mathieu a pour attribut l'homme parce qu'il a commencé son évangile par la liste généalogique des ancêtres du Christ selon la chair. Cet homme rappelle aussi l'incarnation.
Le bœuf, animal du sacrifice, symbolise Saint-Luc qui commence son livre par le sacrifice offert par Zacharie. Le bœuf rappelle la mort sur la croix.
Le lion désigne Saint-Marc dont l'évangile débute par ces mots : "voix qui crie dans le désert ….". Le lion rappelle la résurrection.
L'aigle est l'attribut de Saint-Jean parce que dès l'abord il nous transporte au sein de la divinité, semblable à l'aigle qui seul peut regarder le soleil en face. L'aigle rappelle l'ascension.
Il est dit que la porte à droite du chœur, dont les peintures en ferronnerie sont rapportées, donnait sur le presbytère détruit en 1625. Mais on ne situe pas bien le presbytère et je pencherais plutôt pour une sacristie. On va voir un peu plus loin, pourquoi !
Sous le Chœur furent enterrés deux curés d’Auvillers : en 1700, Jean Zeudde (curé pendant 21 ans), et en 1711, Nicolas Legras.
Au moyen-âge et les siècles suivants, le lieu de sépulture est comme les rites qui entourent les inhumations, assez important. Enterré généralement tourné vers l’Est, (dans l’attente du soleil levant (symbole du Christ ressuscité) le Chrétien est mis dans un sarcophage le plus souvent en plâtre, parfois mais rarement en pierre. Le lieu de sépulture, le cimetière est autour de l’Eglise. Les familles de notables sont souvent les plus proches de l’édifice (et Auvillers n’échappe pas à la tradition puisque la tombe des « Debonnières » se trouvent juste derrière le mur de la Chapelle).
Les curés, les notables étaient généralement enterrés dans l’Eglise par famille parfois même dans une chapelle à l’intérieur de l’Eglise. Le chœur de l’Eglise était généralement réservé au seigneur du lieu et aux prêtres et curés. Les personnes pratiquantes n’ayant pas les moyens de se faire inhumer dans l’Eglise étaient enterrées dans le cimetière, le plus proche possible des murs de l’Eglise (les mauvais paroissiens ne faisant pas leurs pâques, n’allant pas à la messe, étaient enterrés le plus loin possible à côté des portes du cimetière). Les mécréants (protestants, juifs, excommuniés, acteurs, etc…) en sont tout bonnement exclus.
Ce traitement, réservé, aux notables importants est souvent payant, voire même dans certains cas, tarifé. (Il convient de verser telle somme pour pouvoir être enterré dans l’Eglise car cela est un signe de notabilité, de générosité ou de richesse (et des 3 pour un non-noble). Les inhumations dans l’Eglise devenant de plus en plus fréquentes, elles furent interdites vers 1776 (à cause de l’odeur de putréfaction des corps et des maladies).
Un peu plus tard, les nobles les plus riches disposent de chapelles spéciales.
A l’extérieur, c’est le clocher qui est intéressant. Il date de l’époque romane. Sa toiture est en pierre, sans charpente. Bien que ne présentant que quatre arêtes à la base, il s’affine en huit pans. Le clocher et son soubassement sont les parties les plus anciennes de l’Edifice. Il renferme une cloche, datant de 1712 nommée Cécile et dite Antoinette. On peut lire, gravée dans la masse, l’inscription :
« L'an 1712, je suis nommée Cécile, dite Antoinette, par Dame Cécile de Falconnois, épouse de Monsieur Antoine Damanzé, compte (!!) de Chauffaille, seigneur d'Auvillers et autres lieux et suis bénite par Adrien Caron, curé d'Auvillers ».
Au-dessus du clocher, on peut voir un coq car certaines religions (mazdéisme) assimilent le soleil à un coq qui annonce le lever du jour, et nos clochers chrétiens portent encore cet oiseau qui symbolise la vigilance de l’âme en attendant la seconde venue du Christ.
Le cimetière d’Auvillers renferme, outre les tombes de la famille de Monsieur et de Madame de Landevoisin, décédés en 1814 et 1838, celles de Monsieur et de Madame De Bonnières morts en 1892 et 1898, celles de Monsieur Robert de Bonnières de Wierre et de M. Félix Elie de Beaumont, ancien magistrat, tous deux décédés en 1905. Depuis Jean de Bonnières et son épouse Félicie, sa fille Simone et son fils Jacques et son épouse, sont venus rejoindre la famille.
Dans la sacristie ! Est une petite pierre rectangulaire scellée dans le mur de l’église. Elle date de 1579 et porte en caractères gothiques une inscription concernant l’un des seigneurs d’Auvillers. Le temps, grand destructeur des œuvres humaines, a effacé en partie plusieurs mots. Néanmoins voici ce que nous avons pu lire sur la pierre :
« Mre Louis d’Erquinvillier, ch.v.r, fils d’Ollivier, Sr du lieu dit ………………… ».
Cette pierre ne parait pas avoir été la partie d’une plus grande, puisqu’elle est entourée d’une bordure sculptée dans la pierre même. Elle ne mentionne ni décès, ni transaction, mais constate simplement l’existence des seigneurs du lieu à cette époque, comme le ferait une plaque que l’on appose sur le mur extérieur d’un édifice à l’inauguration d’une construction neuve ou d’une reconstruction partielle.
Une autre pierre, jadis placée devant l’autel de la Vierge est scellée extérieurement près de la sacristie. Elle a été apposée là quand on refit le carrelage de l’Eglise. Elle représente deux personnages, homme et femme, en costume du XVe ou du XVIe siècle. Il semble que ce soit Messire d’Erquinvillier et Damoiselle Marthe Alleaume, sa femme, dame de Rouilly en Brye, lesquels décédèrent, à savoir, le 2e jourr d’août ………….
N'oublions pas, en sortant, que Rodin qui était un grand admirateur de l’architecture du Moyen Age et de la Renaissance, passa à Clermont, Auvillers, Cambronne et Neuilly-sous-Clermont, et a laissé des dessins (aujourd’hui au musée Rodin à Paris) de ces églises.