HISTOIRE DE L’EGLISE FORTIFIÉE SAINT MARTIN DE LINXE
L’Eglise de Linxe se situe sur un point haut, au carrefour de deux anciens chemins. Elle surplombe le petit ruisseau du Cout, appelé aussi Binaou. Un mur de clôture, dessinant une sorte de « patatoïde », englobait jusqu’au XIXème siècle le cimetière et l’église. En bordure du chemin principal, un bâtiment-porche, dont l’origine et la vocation régionale reste en partie à définir, donnait accès au cimetière. Une entrée secondaire se trouvait vraisemblablement au nord de l’édifice, au niveau d’un décrochement dans le mur de clôture.
L’analyse architecturale menée sur le bâtiment permet d’identifier différentes campagnes de travaux. L’Eglise se composait originellement d’une simple nef et d’une abside à trois pans, toutes deux charpentées. Un plafond constitué de larges planches devait unifier l’ensemble. L’édifice décrit ici pourrait correspondre à l’église romane mentionnée dans le cartulaire de la cathédrale de Dax (XIème-XIIème siècles) sous le vocable de Sanctus Martinus de Linsa.
Comme les églises des paroisses voisines, l’église de Linxe est fortifiées au cours de la guerre de Cent Ans et se dote d’un véritable système défensif. L’édifice est alors surélevé de cinq mètres environ. En partie haute, des ouvertures de tir disposées régulièrement assuraient la défense de la nef et de l’abside. Un chemin de ronde intérieur permettait une circulation rapide des guetteurs. Les ouvertures se présentaient alors toutes ou en partie comme d’étroites meurtrières destinées à l’arme de jet comme l’arc. Aujourd’hui, seules deux ou trois de ces baies sont encore en place côté nord, sous les combles. Les autres visibles depuis l’extérieur, ont été vraisemblablement transformée en baies plus larges, à l’image de véritables merlons. Ce crénelage daterait-il du XIXème siècle, époque à laquelle on aurait pu juger avantageux de donner à l’édifice de Linxe une image « médiévale » plus en accord avec les stéréotypes de l’époque ?
L’église s’est aussi dotée à l’ouest d’une grande tour-porche, parmi les plus grandes du secteur. L’apport du plan de cadastre ancien pour l’analyse du monument et de ses abords est ici d’une importance considérable. Ce document réalisé dans les années 1830 constitue aujourd’hui l’unique représentation connue de l’église avant la démolition de son clocher en 1868. Ici, les témoignages recueillis à propos de la tour-porche deviennent incontestables. Une tourelle d’escalier fut construite côté sud, à l’entrée du clocher. Disposition qui se retrouve à l’église de Lit et Mixe. Ainsi l’accès au porche se faisait par le flan le mieux protégé du monument, côté pente et ruisseau. Aux deux angles ouest du clocher, les trois importants contreforts représentés sur le cadastre ancien nous donnent une idée de l’ampleur et de la hauteur de la construction. Par ailleurs, le mur du cimetière participait pleinement au système défensif mis en place au Moyen-Age.
Le calme et la prospérité retrouvés dans la seconde moitié du XVème siècle va mobiliser à nouveau la communauté paroissiale sur son église. Le bas côté nord est alors construit et l’on ouvre de grandes arcades entre les deux nefs, à l’image des travaux engagés alors sur l’église de Commensacq. La nef principale jusqu’alors charpentée, reçoit comme le bas-côté une voute sur croisées d’ogives. Cette transformation a pour conséquence de rendre inutilisable certaines meurtrières du chemin de ronde.
Dans la seconde moitié du XIXème siècle, la foudre tombe sur le grand clocher et occasionne de graves désordres. Certains membres du conseil municipal dramatisent le sinistre, d’autres, certainement plus éclairés, relativisent son importance. La démolition du clocher est votée et mise à exécution en 1868, faisant disparaître à jamais un témoin important de l’architecture médiévale des Landes, vraisemblablement le plus vaste clocher du Marensin. « Plus de 10 kg de dynamite furent nécessaires « pour le renverser », et l’on observe aujourd’hui, souvent sans comprendre, ce monument profondément mutilé. Chaque époque produit des mythes et des modes, au point que la plupart des églises du secteur ont reçu comme à Linxe des enduits ciments projetés. Les modes ont depuis évolué et nous connaissons aujourd’hui de nouveaux enduits talochés et grattés. Ces enduits sont certes à base de chaux mais ils traduisent encore bien maladroitement les anciennes « robes blanches » de nos églises landaises construites pour la plupart aux XIème et XIIème siècles. Les enduits anciens étaient en effet généralement serrés à la truelle ou à la « planchette » et recevaient en finition un badigeon de chaux. Comme dans les paroisses voisines, l’église St Martin de Linxe se détachait alors avec éclat dans le paysage environnant, constitué essentiellement de pins maritimes, de chênes pédonculés, de chênes tauzin et de chênes liège.
L’église St Martin constitue aujourd’hui le témoin le plus remarquable de l’histoire de Linxe.