RÉUNION D'INFORMATION SUR LE DOMAINE SKIABLE

Publié le jeudi 01 août 2024 - Saint-Colomban-des-Villards

Derniers événements, étude ClimSnow, perspectives…

Une quarantaine d’habitants étaient réunis, le 12 juillet 2024, dans la salle des Fêtes de Saint-Colomban-des-Villards, à l’invitation du maire, Pierre-Yves Bonnivard.

Accompagné d’élus du Conseil municipal, ce dernier a fait un point à date sur la situation du domaine skiable de Saint-Colomban-des-Villards, puis il a cédé la parole à Carlo Carmagnola, chercheur et formateur en nivologie, qui a présenté l’étude climatologique ClimSnow concernant ce domaine. En fin de séance, Julien Mairot, directeur des opérations de SSDS et du site de Saint-Colomban, exploitant du domaine, a donné son opinion sur les perspectives d’évolution de la station, avec l’éclairage de l’étude ClimSnow.

« Depuis la programmation de cette réunion publique, a souligné le maire en introduction, des événements nouveaux sont survenus. »

Le 13 juin 2024, le préfet de la Savoie a informé la commune de Saint-Colomban-des-Villards qu’il saisissait la Chambre Régionale des Comptes (CRC) concernant sa situation budgétaire, et notamment le poids du domaine skiable.

Nous avons eu énormément de difficultés pour équilibrer le budget 2024 parce que, en raison d’un faible enneigement, SSDS a vendu peu de forfaits de ski, enregistré peu de recettes. Et lorsque les remontées mécaniques sont fermées au public, il faut tout de même payer les charges de fonctionnement. »

Un déficit d’un million d’euros

« À la fin de saison hivernale 2023/2024, l’exploitation du domaine skiable accusait un déficit de l’ordre d’un million d’euros. 

Fidèle à notre engagement, nous n’avons pas augmenté les impôts communaux pour combler ce déficit, du moins jusqu’à aujourd’hui. Nous avons réussi à équilibrer le budget, avec les 300 000 euros de participation du Groupe Sybelles et les 674 000 euros de subvention de la commune de Saint-Colomban-des-Villards. Et l’on reste dans l’incertitude pour la saison prochaine. 

Point positif, du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2023, la commune n’a quasiment pas fait d’emprunts. Elle s’est même désendettée à hauteur de 49%, des emprunts arrivant à échéance.

La charge des emprunts a été quasiment divisée par deux en six ans. C’est ainsi que l’on a pu retrouver du souffle financier, mais celui-ci est destiné à réduire le déficit du domaine skiable et à la gestion des remontées mécaniques vieillissantes. »

Une subvention communale considérée comme excessive

Lors du Conseil municipal du 28 juin 2024, il n’a pas été procédé au vote d’un budget supplémentaire, contrairement à ce qui était prévu, car, suite au contrôle de légalité des budgets communaux votés le 15 avril, le préfet de la Savoie a saisi la Chambre Régionale des Comptes (CRC) sur trois points.

Deux d’entre eux sont purement techniques, et il a été facile pour la commune de fournir des réponses appropriées aux demandes d’explication du magistrat financier.

Le troisième point de la saisine concerne le versement par la commune d’une subvention d’équilibre de plusieurs centaines de milliers d’euros, du budget principal au budget annexe Remontées mécaniques, et ce, sans délibération la motivant.

Cette saisine a induit une inspection fouillée, la subvention supérieure à 50 % des recettes du domaine skiable étant considérée comme excessive.

« L’avis rendu par la CRC aux alentours du 20 juillet, a commenté le maire, sera particulièrement important et débouchera sur des recommandations, voire des injonctions du préfet de la Savoie à la commune. » 

Amortissements : 200 000 euros annuels sur 10 ans…

Le budget communal est aujourd’hui équilibré. Mais lors des échanges avec le magistrat financier de la CRC, un autre sujet est venu régulièrement sur la table, celui des amortissements.  

Tout investissement pour du matériel - des remontées mécaniques, par exemple -, nécessite la mise en place d’un plan d’amortissements. Ce qui n’a jamais été fait à Saint-Colomban-des-Villards. Sauf que les règles comptables ont changé, ces deux dernières années, et pour les activités de type commercial, il faut désormais intégrer les amortissements depuis le 1er janvier 2024.

Aujourd’hui, la commune de Saint-Colomban-des-Villards devrait prendre en compte deux millions et demi d’euros d’amortissements restants, soit environ 200 000 euros annuels sur 10 ans.

« Si, en 2024, a ajouté le maire, on demande à la commune d’intégrer dans son budget une telle somme, il ne sera pas possible de le faire. Ou alors, il faudra revoir la fiscalité communale. Ou diminuer le peu d’investissements qui sont prévus. Ou trouver des astuces pour réduire encore les dépenses de fonctionnement. Mais l’exercice a ses limites. »

Étude d’impact du changement climatique  et projection de l’évolution de l’enneigement sur la station de Saint-Colomban-des-Villards

La deuxième partie de la réunion publique a été consacrée à l’étude ClimSnow, avec une intervention de Carlo Carmagnola, chercheur et coordinateur du service ClimSnow, un consortium rassemblant Météo- France, la société d’ingénierie touristique Dianeige et l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE). 

Le maire de Saint-Colomban-des-Villards, Pierre-Yves Bonnivard, a d’emblée situé le contexte : « Nous avons besoin de cette étude ClimSnow sur l’enneigement futur de la station et du domaine skiable pour prendre les meilleures décisions possibles dans l’avenir. C’est un enjeu crucial dans le cadre d’une stratégie d’adaptation au changement climatique. »

L’étude ClimSnow a coûté de l’ordre de 20 000 euros TTC à la commune.

ClimSnow, c’est quoi ?

Brièvement, c’est une étude, un service qui permet d’établir des prévisions de l’enneigement des stations de ski, leur fiabilité et variabilité à diverses échéances et la capacité pour les stations à maintenir leur exploitation dans le temps. 

Le modèle évalue l’évolution des températures et de l’enneigement mais aussi représente les effets du damage et de la production de neige de culture, en fonction des différents scénarios d’évolution du climat.

ClimSnow est un travail scientifique, objectif et neutre. Il peut servir d’outil d’aide à la décision pour les exploitants des stations de ski et les collectivités. Les services de l’État se réfèrent à ce modèle pour évaluer la viabilité d’un projet d’aménagement.

Cette étude sert notamment aux plans d’investissement. Elle est demandé par les banques.

Quels sont les paramètres pris en compte par ClimSnow ?

L’évolution du climat est piloté par les émissions anthropiques de gaz à effet de serre dans l’atmosphère : gaz carbonique, méthane…

On ne sait pas ce qui va se passer dans le futur, car cette évolution dépend de choix politiques, au niveau mondial. Et quand les scientifiques ignorent quelle sera l’augmentation de la concentration atmosphérique de gaz à effet de serre, ils font des modèles, des projections climatiques avec plusieurs scénarios et leurs conséquences sur le réchauffement de la planète :

  • un scénario optimiste (appelé RCP2.6). Dès à présent, on fait baisser les émissions globales de gaz à effet de serre, et la neutralité carbone est atteinte à partir des années 2050. Potentiellement, c’est possible, mais nous ne sommes pas dans cette trajectoire ; 
  • un scénario moyen et plus réaliste (RCP4.5). On va continuer à émettre des émissions de gaz à effet de serre au rythme actuel, et à partir de 2050, on commence à les faire baisser ;
  • un scénario pessimiste (RCP8.5). La poursuite des émissions est forte et sans contrôle.

En fonction des scénarios, on peut mesurer quel va être l’impact des concentrations des gaz à effet de serre sur les températures. À la fin du siècle, avec un scénario pessimiste et une température de + 4°C, c’est un monde sans ski. Si on prend le scénario optimiste, on skiera, presque de partout, mais avec des dégradations de la qualité du ski et de l’enneigement. 

Du modèle planétaire au modèle local

ClimSnow s’appuie sur les projections du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) et des grands modèles de circulation globale du climat, qui ont une résolution plutôt grossière de 150 kilomètres.

Avec des niveaux de zoom progressifs, ClimSnow permet de passer de ces modèles globaux, à une échelle régionale et locale (piste de ski, domaine skiable) pour ajuster les tendances. Pour cela, trois paramètres clés sont pris en compte : l’altitude, l’orientation et la pente. Le tout permet de prévoir le type de précipitations (liquide, solide) qui va être piloté par la température. 

Pour la modélisation de la neige, ClimSnow se sert du modèle Crocus-Resort développé par Météo-France permettant de simuler l’évolution de la neige naturelle, les effets du damage (compactage et fraisage) et la production de neige de culture, en fonction de la période de la saison, du type d’enneigeur, de la température humide, de la vitesse du vent et de l’objectif de production.

Le modèle exploite tous les créneaux de froid disponibles, sans perde une heure, avec l’hypothèse que tous les enneigeurs puissent fonctionner simultanément à plein régime, sans aucune contrainte (par exemple, volume d’eau prélevé sans limite) et dans une situation la plus idéale.

Outre l’évolution de l’enneigement naturel et géré, ClimSnow permet de quantifier le besoin en eau associé à la production de neige.

Au final, les résultats sont projetés sur les pistes de ski sous forme de graphiques, tableaux, cartes 2D ou 3D dans un rapport accessible aux non spécialistes.

Quel ski en 2050 ?

Grâce au modèle ClimSnow, il est possible de prévoir quel ski on pratiquera en différents secteurs du domaine skiable de Saint-Colomban-des-Villards dans les décennies à venir.

Dans notre commune, à l’horizon 2050 et en considérant le scénario pessimiste, on peut dégager les constats suivants :

  • Au point culminant du domaine (2224 mètres), les durées d’enneigement en neige naturelle damée seront de 114 jours lors des saisons défavorables, 135 jours lors des saisons moyennes et jusqu’à 154 jours lors des saisons favorables. En prenant en compte la production de neige (systèmes de type « perches »), les durées d’enneigement, en 2050, seront comprises entre 141 jours lors des saisons défavorables et 168 jours lors des saisons favorables.
  • À l’altitude moyenne du domaine (1575 mètres), les durées d’enneigement en neige naturelle damée seront de 52 jours lors des saisons défavorables, 87 jours lors des saisons moyennes et jusqu’à 115 jours lors des saisons favorables. En prenant en compte la production de neige (systèmes de type « perches » installés sur l’ensemble des surfaces équipés), les durées d’enneigement, en 2050, seront comprises entre 114 jours lors des saisons défavorables et 144 jours lors des saisons favorables.
  • À l’altitude minimum du domaine (1082 mètres), les durées d’enneigement en neige naturelle damée seront de 0 jour lors des saisons défavorables, 26 jours lors des saisons moyennes et jusqu’à 55 jours lors des saisons favorables. En prenant en compte la production de neige (systèmes de de type « perches »), les durées d’enneigement, en 2050, seront comprises entre 70 jours lors des saisons défavorables et 114 jours lors des saisons favorables.

« Il y a des chances que la station de Saint-Colomban-des-Villards soit ouverte en 2050, mais ce ne sera pas la station d’aujourd’hui, et on ne pratiquera pas le même ski. Il faut l’accepter, » a conclu Carlo Carmagnola. 

Le modèle dit que l’enneigement moyen va se dégrader petit à petit. Sur la deuxième moitié du siècle, il peut se dégrader sérieusement, dans le cas d’un scénario pessimiste.

On n’est ni dans l’amélioration de la situation actuelle, ni dans un décrochage immédiat.

À la fin du siècle, si on est sur une mauvaise saison, on ne skie pas. En revanche, il y aura toujours des bonnes saisons. Avec une amélioration notable des conditions de la pratique du ski, grâce à l’apport de neige de culture.

L’indicateur intéressant, c’est la fréquence durant laquelle les mauvaises saisons vont arriver. Aujourd’hui, elles sont exceptionnelles. À un certain moment, ces saisons-là pourraient survenir une saison sur deux, tous les ans, avec le scénario pessimiste… Il faut se préparer à avoir de plus en plus de mauvaises saisons d’enneigement à gérer.

À une question de l’assistance, « Y a-t-il encore de l’espoir pour Saint-Colomban-des-Villards ? », le nivologue a répondu : « oui », mais il faut faire les bons choix, des choses ont plus de sens que d’autres.

« Il est évident que sécuriser le bas du domaine skiable demanderait des moyens, notamment financiers, très importants. Et si vos moyens sont limités, ce qui est le cas, logiquement, il faut les mettre là où il y a plus de chance que les bonnes conditions d’enneigement tiennent longtemps, en sacrifiant une partie de la surface du domaine skiable.

Vous avez la chance d’avoir un grand domaine avec un accès en altitude sur la combe de Bellard et Les Sybelles. »

A une autre question de l’assistance, « Quels sont les volumes d’eau prélevés à Saint-Colomban ? », Julien Mairot, directeur des Opérations de SSDS, a répondu : « 39 000 mètres cubes maximum, autorisés par arrêté préfectoral. Le Maire m’a demandé d’effectuer les démarches pour les augmenter, mais il faut plusieurs années de dossier, avec notamment un dossier Loi sur l’eau ». 

A une question de l’assistance, « Pour les ressources en eau, pourquoi ne pas construire une retenue collinaire ? », Julien Mairot a répondu : « Ce type de travaux nécessite au moins dix ans de procédure, sous réserve que le projet ne tourne pas au conflit local comme à La Clusaz, et il nécessite plusieurs millions d’euros d’investissements. Il faut aussi avoir l’endroit pour le faire. »

Enjamber la partie basse du domaine par une liaison téléportée

Revenant sur le devenir du domaine skiable, Julien Mairot a exprimé son point de vue d’exploitant : « Ce qui me semble le plus raisonnable c’est d’aller se connecter en direct sur la partie du domaine skiable où il y a de la neige, en remontant le bas du domaine skiable sur une zone plus haute, et là, recréer un espace de front de neige où effectivement, d’un point de vue climatique, il y a une viabilité à terme.

Le choix dépend d’une décision de la collectivité, mais en enjambant la partie basse du domaine par une liaison téléportée, on s’affranchit du secteur le plus difficile à exploiter : débauche de moyens pour produire de la neige de culture, avec ses limites ; une centaine de tirs du Plan d’Intervention de Déclenchement d’Avalanches (PIDA) par saison, un appareil à 45° de pente, des évacuations extrêmement difficiles, une piste des Bouyans, qui est particulièrement dangereuse.

En regard des coûts de maintenance relevés sur la station, la question à poser au Conseil municipal est, à mon avis, la suivante : « Y a-t-il une volonté de maintenir le ski alpin à Saint-Colomban-des-Villards ? La réponse est plutôt oui. C’est ce qu’on est en train d’étudier aujourd’hui pour voir combien coûte la réalisation d’une liaison par les airs en démantelant le reste des appareils. »

En conclusion, le maire de Saint-Colomban-des-Villards, Pierre-Yves Bonnivard, a résumé le contenu de la réunion : « L’exploitation du domaine skiable a été abordée sous deux angles, à court et à long terme. »

Le court terme, c’est de voir quel va être l’avis de la Chambre Régionale des Comptes sur notre budget communal, et ensuite, quelles seront les injonctions de la Préfecture. Et d’en tirer les conséquences.

Pour le long terme, la commune travaille actuellement sur un nouvel appel d’offres concernant la gestion du domaine skiable, car le contrat de l’actuel exploitant (SSDS) cesse le 30 novembre 2025.

L’étude ClimSnow qui apporte des éclairages sur l’enneigement, des compléments d’information va nous aider à prendre les bonnes décisions. Le point principal reste bien sûr le sujet financier, avec des moyens qui ne sont pas infinis. »

Publié par Mairie de Saint-Colomban-des-Villards