Château de Courmenant

Situé sur la commune de Rouez-en-Champagne, la découverte du donjon de Courmenant par la petite route étroite est surprenante et écrasante. La construction domine un fort escarpement au-dessus de la Vègre qui s’étalait autrefois dans une large zone marécageuse.

À la fin du VIIIe siècle, les Normands[1] et Bretons[2] menaçaient le pays du Maine. Dès cette époque, Roland (preux), neveu de Charlemagne, qui devait périr à la bataille de Roncevaux, était commis à la garde de la frontière ; il eut pour successeur son gendre Eginard Wido ou Guido.

Les incursions des Barbares prenant un caractère alarmant, Charlemagne, par une rescrit de 810[3], notait les points où les pirates pouvaient le plus facilement pénétrer à l’intérieur du pays, et par suite, plusieurs forteresses furent établies sur la rive gauche de la Mayenne.

Charles le Chauve renouvela les prescriptions de Charlemagne et c’est sans doute lors de son séjour au Mans, vers 867, qu’il ordonna la construction du donjon de Courmenant qui, par sa situation, au milieu d’un groupe de chemins et sur le bord d’un marais formant obstacle du côté de l’ouest, répondait aux conditions de programme.

Son origine carolingienne est d’ailleurs bien accusée par le caractère des maçonneries qui en restent et surtout par l’absence des contreforts aux murs extérieurs, signes distinctifs des châteaux militaires antérieurs au XIe siècle, époque à laquelle ils apparaissent pour la première fois.

Les trois autres côtés du château sont entourés de profonds fossés secs. La base du mur nord attesterait une occupation dès le 9ème siècle. Le manque de textes, de travaux de recherche, de fouilles, ne nous permettent pas de présenter avec preuves l’histoire du château. Néanmoins, l’architecture du haut donjon de plan rectangulaire aux murailles épaisses sur trois étages, avec escalier interne, fait preuve d’une construction du 11ème siècle. La grande salle a toutes les caractéristiques d’une salle seigneuriale. Une grande partie du château fut détruite et reconstruite pendant la guerre de Cent Ans puis reconstruit par la suite.

François Liger, architecte autodidacte devenu membre de la Société française pour la conservation des monuments historiques et collaborateur d’Hausmann, se retire à partir de 1885 à Courmenant dont il a hérité en 1859, Il s’est alors passionné pour l’archéologie régionale mais fut souvent raillé par ses collègues.

Il rasa le bâtiment du 15ème pour ne laisser que les murs extérieurs du donjon. Il restaura la façade sur la cour entre 1860 et 1875 dans un style roman du 12ème siècle : portes géminées avec animaux fantastiques, croisées avec colonnettes, chapiteaux historiés, blasons. Sur les murs, des hauts-reliefs représentent les seigneurs et possesseurs du donjon. Au pied des murs se dressent hauts-reliefs et sculptures en ronde-bosse monumentaux : chevaliers, princesses, diables, damnés, Héloïse, Abélard… Tout cet ensemble fut commandé au sculpteur C. Marie. Il fit également dresser sa statue dans la cour, assis et méditatif, les outils d’archéologue à ses pieds. Près de lui est gravée sur une pierre volumineuse toute la liste de ses écrits. C’est un ensemble déconcertant, inattendu, d’une exaltation romanesque.